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USA : La nouvelle géographie de l’immigration

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Après avoir été longtemps concentrés dans un petit groupe d’Etats, les immigrés s’installent partout, aussi bien dans les grandes métropoles que dans les petites villes. Une tendance qui bouleverse les rapports sociaux.


Lorsqu’on évoque l’immigration récente aux Etats-Unis (notamment celle des Latinos), seule une poignée d’Etats (Californie, Texas, New York, Illinois et Floride) ainsi que quelques grandes villes (essentiellement New York, Los Angeles, Houston, Miami, Chicago) semblent concernés par la question. Mais il est temps de rompre avec cette habitude. L’éparpillement de la population immigrée sur tout le territoire des Etats-Unis est l’une des tendances démographiques les plus frappantes de ces dernières décennies. Désormais, les immigrés s’installent aussi bien dans les petites villes que dans les grandes métropoles, en banlieue et dans les ghettos des centres-villes, à la campagne et en ville, dans l’Amérique profonde autant que sur les côtes. La part des habitants originaires du Mexique installés dans les quatre Etats frontaliers (plus l’Illinois) est passée de 10 % en 1999 à 25 % en l’an 2000.
Cette tendance est à l’origine d’un des changements démographiques majeurs de l’histoire américaine récente. Les Etats “blancs” du Midwest et ceux “noirs et blancs” du Sud deviennent des destinations de prédilection pour les immigrés (sur les dix Etats présentant la plus forte croissance de population d’origine mexicaine, huit se situent dans le Sud). On remarque également l’apparition d’improbables foyers de population latinos tels que Dalton en Géorgie, Garden City au Kansas, Storm Lake dans l’Iowa ou Nashville dans le Tennessee. Des sondages indiquent qu’entre 1990 et 2000 la communauté hispanique du comté de Franklin, en Alabama, a augmenté de 2 193 %, et celle du comté de Gordon, en Géorgie, de 1 534 %.
Cette révolution démographique – examinée en détail dans le fascinantNew Faces in New Places [éd. Russell Sage Foundation Publications, 2008, non traduit en français], de Douglas Massey, professeur à l’université de Princeton – explique en grande partie pourquoi l’immigration est devenue un sujet aussi sensible dans la politique du pays. Bon nombre d’Américains se trouvent désormais face à face avec des Latinos qu’ils n’auraient jamais croisés auparavant ailleurs qu’à Hollywood. Et de plus en plus de pauvres, des Noirs et des Blancs, se retrouvent en compétition avec de nouveaux immigrés prêts à travailler pour un salaire plus faible et dans de plus mauvaises conditions. Dans tout le pays, on croise maintenant dans les rues des petites villes des ouvriers journaliers en attente de travail ou des écoliers ne parlant pas un mot d’anglais.
Cette révolution est en partie une histoire de chiffres. Plus de 60 millions d’Américains (soit un cinquième de la population) sont des immigrés ou sont d’origine immigrée récente. Les traditionnelles villes d’immigration approchent de la saturation. Et la Californie, en particulier, n’exerce plus le même pouvoir d’attraction qu’auparavant.


Certains états accueillent les immigrés à bras ouverts
Pourquoi lutter dans l’économie souterraine de ces villes où les loyers sont inabordables quand on peut mener une vie beaucoup plus confortable dans le Sud ou le Midwest ? La proportion d’immigrés s’installant en Californie a chuté de 35 % dans les années 1985-1990 à 21 % entre 1995 et 2000. On observe deux facteurs d’accélération de ce mouvement. Le premier est le renforcement des contrôles aux deux principaux points d’entrée des clandestins, à El Paso, au Texas, et à San Diego, en Californie. Les immigrés préfèrent maintenant traverser la frontière en Arizona et dans les zones désertes du bas de la vallée du Rio Grande. De là, ils sont plus enclins à se disperser dans tout le reste du pays qu’à se concentrer à Los Angeles ou à Houston. Le second facteur de changement est la restructuration de larges pans de l’économie américaine, en particulier dans l’industrie de l’abattage et du secteur agroalimentaire. Pour faire face à la concurrence internationale, les grandes sociétés ont déplacé leurs abattoirs des vieux centres industriels – très contrôlés et fortement syndicalisés – vers les petites villes et les zones rurales.
Quelles sont les perspectives pour ces nouveaux immigrés qui s’installent dans tout le pays, remplissent les rayons alimentaires de l’Amérique et bâtissent ses maisons ? Il y a des signes encourageants. Certains Etats, comme l’Iowa, accueillent à bras ouverts les immigrés qui redonnent vie à de petites villes et à des zones rurales dépeuplées. Les immigrés installés en dehors des zones métropolitaines gagnent mieux leur vie que dans les années 1990 et sont de plus en plus installés dans des maisons avec des enfants. Mais l’étude de Douglas Massey, qui témoigne d’une véritable empathie à l’égard de son sujet, dresse également un constat plus sombre. Les nouveaux immigrés américains sont confrontés à une situation beaucoup plus difficile que leurs prédécesseurs européens. Les populations hispaniques sont handicapées par leur faible niveau d’éducation dans une société qui accorde une importance croissante à la formation. L’arrivée constante de nouveaux immigrés ne fait que renforcer la pression à la baisse des salaires, et le ressentiment à l’égard des immigrés clandestins va croissant. Toutes ces questions devraient revenir sur le devant de la scène avec l’arrivée des campagnes présidentielles au Texas et dans l’Ohio dans les jours qui viennent.


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